À lire, à voir : des œuvres pour prolonger notre hors-série “Femmes, le combat continue”

Les Filles du Nil Film documentaire de Nada Riyadh et Ayman El Amir (2025)

Les deux réalisateurs de ce documentaire ont suivi durant quatre ans un groupe d’amies qui montent des spectacles de rue dans leur petite ville copte du centre de l’Égypte. Au sortir de l’adolescence, alors que la pression sociale commence à s’exercer sur elles pour qu’elles se marient, elles mettent en scène leurs rêves et leurs peurs et interrogent les conventions de cette région pauvre et conservatrice.
Il reste encore demain Film de Paola Cortellesi (2023)

C’est “l’histoire d’une femme banale” et celle de “la naissance d’une conscience qui germe spontanément dans [sa] vie”, décrit la réalisatrice, qui incarne cette mère de trois enfants, mariée à un homme violent, et qui s’émancipe dans la Rome de l’après-guerre. En Italie, porté par la mobilisation contre les féminicides, ce long-métrage en noir et blanc est devenu un phénomène, le plus gros succès de 2023, devant Barbie et Oppenheimer.
In My Skin Série de Kayleigh Llewellyn (2018-2021)
Une série galloise bouleversante sur l’adolescence et l’entrée dans l’âge adulte. Bethan a 16 ans, une mère bipolaire et un père alcoolique. Mais c’est une autre histoire qu’elle raconte à ses amis. Une “double” vie et le sentiment permanent d’un très fragile équilibre.
Les Graines du figuier sauvage Film de Mohammad Rasoulof (2024)

Condamné à cinq ans de prison pour “collusion contre la sécurité nationale”, Mohammad Rasoulof a tourné ce film clandestinement avant de fuir l’Iran. En plein mouvement Femme, vie, liberté, dans un Téhéran où les violences policières règnent, des femmes fortes luttent contre le patriarcat jusqu’au sein de leur famille. Un film sensible et puissant.
Black Box Diaries Film documentaire de Shiori Ito (2025)

La journaliste Shiori Ito restitue dans ce film l’enquête qu’elle a menée sur son propre cas après avoir accusé de viol un journaliste influent et avoir vu la justice abandonner les poursuites – elle a finalement obtenu gain de cause au civil. Ce documentaire choc, nommé pour les Oscars 2025, ne dissimule rien des réactions hostiles qu’a déclenchées sa décision de ne pas se taire.
Chronique arctique Série de Stacey Aglok MacDonald et Alethea Arnaquq-Baril (2025)
Comment prendre son indépendance, quitter son mari et construire une nouvelle vie quand on habite dans une petite commune du Nunavut, territoire arctique canadien, où tout le monde se connaît ? Netflix et ses coproducteurs, CBC et APTN, ont d’ores et déjà annoncé une deuxième saison de cette série qui flirte avec la comédie romantique tout en donnant à voir la culture inuite sous un jour nouveau.
Her Story Film de Yihui Shao (2025)
Présenté comme une réponse chinoise au blockbuster Barbie, ce film s’attache aux liens qui se nouent entre ses trois héroïnes, une mère célibataire, sa fille âgée d’une douzaine d’années et leur voisine, qui tente de faire carrière dans la musique. Son succès en Chine est apparu comme un reflet des “aspirations de la communauté féminine”, note le site Duan Chuanmei.
L’Affaire Nevenka Film d’Icíar Bollaín (2024)

À la fin des années 1990, Nevenka Fernández, 25 ans, est élue conseillère municipale et devient la protégée du charismatique maire de sa commune. Manipulée pendant des mois par le quinquagénaire, elle parvient à se soustraire à son emprise et à le faire condamner, en 2001, pour harcèlement sexuel. La réalisatrice Icíar Bollaín reconstitue avec rigueur cette histoire vraie, qui a marqué un tournant dans la manière dont l’Espagne traite les violences sexuelles.
Unbelievable Minisérie de Michael Chabon, Susannah Grant et Ayelet Waldman (2019)

Fondée sur une histoire vraie, cette série en huit épisodes au casting impeccable (Kaitlyn Dever, Merritt Wever, Toni Collette) retrace le calvaire d’une adolescente américaine accusée de dénonciation de crime imaginaire après avoir été violée chez elle par un inconnu. Une fiction édifiante qui éclaire les dysfonctionnements de nombreuses enquêtes pour viols.
Le Blues du maestro Série de Christoforos Papakaliatis (Grèce, 2022-2024)

La troisième et dernière saison de cette série grecque à succès a été mise en ligne sur Netflix en décembre dernier. Malgré un male gaze (“point de vue masculin”) très présent, cette série montre des personnages féminins très forts et met à l’écran la question des violences conjugales et plus généralement des violences faites aux femmes.
Tout le monde peut être féministe bell hooks (Divergences, 2020)
Les livres de bell hooks, disparue en 2021, à 69 ans, sont devenus un phénomène de librairie – notamment Tout le monde peut être féministe. Théoricienne du black feminism, cette intellectuelle et militante américaine travaille les liens entre féminisme, lutte des classes et racisme.
Elle est publiée en France aux éditions Divergences, qui proposent dans leur catalogue d’autres textes féministes importants comme La Parole aux négresses d’Awa Thiam, Par-delà les frontières du corps de Silvia Federici, La Puissance féministe de Verónica Gago ou encore Une histoire des produits menstruels de Jeanne Guien, Des femmes et du style d’Azélie Fayolle et Théories féministes voyageuses de Mara Montanaro.
Notre corps, nous-mêmes Collectif NCNM (Hors d’atteinte, 2020)
La réactualisation, après plus de quarante ans, d’un des plus grands classiques internationaux du féminisme.
Puberté, sexualité, contraception, avortement, accouchement, vieillesse… Ce manuel construit à partir de témoignages et d’entretiens propose des outils de connaissance et d’émancipation. Une véritable bible écrite par les femmes pour les femmes.
Dans le palais des miroirs Liv Strömquist (Rackham, 2021)
Dans cette bande dessinée consacrée à notre rapport à la beauté, comme dans I’m Every Woman (2018) ou encore Les Sentiments du prince Charles (2016), l’autrice suédoise restitue sur un ton humoristique les réflexions féministes sur la place des femmes dans la société, le contrôle de leur corps et de leur image, le couple hétérosexuel, l’histoire… Le guide du patriarcat illustré.
Une merveilleuse arithmétique de la distance Audre Lorde (Gallimard, 2025)
Dans ce recueil de poèmes écrits à partir de 1987, la poétesse afro-américaine Audre Lorde, morte en 1992, “exprime sans fard les différentes facettes d’une femme en mouvement, en quête de libération et de sororité”, selon l’éditeur. Il est publié dans une édition bilingue, avec une traduction de Providence Garçon et Noémie Grunenwald et des préfaces d’Alice Diop, Fatou S., Kiyémis et Mélissa Laveaux.
Moi qui n’ai pas connu les hommes Jacqueline Harpman (Stock, 2025)
La narratrice a grandi enfermée dans une cave avec 39 autres femmes. Quand les captives se libèrent, elles se trouvent sur une plaine inconnue et déserte, et partent en quête d’autres humains. C’est le bouche à oreille sur les réseaux sociaux qui a conduit à la réédition de ce roman dystopique de l’autrice belge Jacqueline Harpman, publié en 1995. “La Gen Z a trouvé sa Servante écarlate”, s’exclame The Cut, en référence au livre culte de Margaret Atwood.
Les Argonautes Maggie Nelson (Éd. du sous-sol, 2018)
Dans ce livre hybride, à la fois journal, poème, réflexion philosophique et essai sur le genre, la poétesse et intellectuelle américaine raconte son quotidien familial : elle, femme se revendiquant queer, est enceinte de son mari en pleine transition de genre, qui a déjà un enfant de 3 ans. Une révolution de l’intime devenue un best-seller.
Spent Alison Bechdel (Denoël, à paraître le 22 octobre)
L’autrice de Fun Home et de Gouines à suivre met en scène dans cette autofiction une dessinatrice nommée Alison Bechdel qui vit avec sa compagne et une multitude de chèvres dans le Vermont. Alors qu’elle rêve de “donner l’ultime coup de grâce au capitalisme tardif” avec son prochain livre, une de ses œuvres est adaptée en série à succès. “Un exercice de vérité aussi délicieux que désenchanté”, salue le Los Angeles Times.
Quel est donc ton tourment ? Sigrid Nunez (Stock, 2023)
Dans ce roman magnifique (adapté au cinéma par Pedro Almodóvar, sous le titre La Chambre d’à côté), une femme, atteinte d’un cancer et qui se sait condamnée, demande à la narratrice, dont elle fut proche il y a des années, de l’aider à se suicider. Un récit poignant et une réflexion sur le lien qui nous unit, l’amitié mais aussi la littérature et le deuil.
La Place (Motifs, 2025 pour le n° 3)
Maya Ouabadi et Saadia Gacem ont lancé en 2021 la revue La Place. Respectivement fondatrice des éditions Motifs et doctorante en anthropologie du droit, elles inscrivent cette revue singulière dans la lignée des combats des femmes algériennes dont elles se veulent les héritières. Mais la revue se pense aussi porteuse d’un féminisme tout à la fois universel et intime, théorique et ancré.
Courrier International